AccueilRevue de droit canonique, t. 51/1
(juin 2001)
RÉSUMÉS Sommaire 51/1
english summaries Zusammenfassungen
L’analyse du phénomène sectaire en
Europe pose le problème de la définition de la secte. Les statuts des cultes
ont été élaborés pour, et souvent en collaboration avec les Églises et
religions dominantes. Ils ont été récemment étendus aux religions
minoritaires. Mais les sectes, groupements religieux socialement
controversés, sont, sauf exception, exclus des dispositions contenues
dans ces statuts, comme l’illustre, par exemple, le sort juridique réservé
à la Scientologie ou aux Témoins de Jéhovah.
La France a adopté le 12 juin
2001 une loi « tendant à renforcer la prévention et la répression
des mouvements sectaires portant atteinte aux droits de l'homme et aux
libertés fondamentales ». Les évolutions qu’a connues la
proposition de loi avant d’être adoptée sont significatives. Trois problèmes
sont ici étudiés : comment élaborer une législation spécifique sur
les sectes sans porter atteinte à la neutralité de l’État en matière de
convictions religieuses ? Comment définir juridiquement une secte ?
Pourquoi le délit de « manipulation mentale », prévu par la
proposition de loi, est-il finalement devenu « abus d’état
d’ignorance ou de situation de faiblesse » ?
Dans l’Église catholique,
les attitudes face au phénomène sectaire vont dans le sens d’une
ouverture. L’expression « nouveau mouvement religieux » est préférée
à celle de « secte » parce qu’elle est plus impartiale et plus
précise. Après une période de rejet, l’Église a progressivement découvert
dans « le problème des sectes » un défi pastoral, puis a engagé
un dialogue avec les mouvements les plus intégrés dans le tissu social. Néanmoins,
la position de l’Église catholique face aux nouveaux mouvements religieux hésite
encore entre l’opposition farouche due à des sentiments de menace, et
l’ouverture prudente.
D’un point de vue historique,
la secte fait partie de la mouvance protestante. En effet, l’ecclésiologie
des Réformes est fondée sur le sacerdoce universel des fidèles, ce qui a
suscité rapidement de nombreux mouvements dissidents. Quatre approches sont
présentées : l’approche sociologique de Troeltsch, les prises de
position de la Fédération protestante de France, l’approche du colloque
d’Amsterdam en 1986, et, enfin, la position de la Fédération des Églises
protestantes suisses sur l’affaire de l’Ordre du Temple Solaire en 1994.
Il en ressort que la secte ne s’y trouve jamais stigmatisée et qu’au
contraire, les protestants prônent la vigilance, l’éducation et le
dialogue, en même temps que l’application de la législation en vigueur.
Le phénomène sectaire est très
rare dans le judaïsme d’aujourd’hui. On peut citer, à titre d’exemple,
un mouvement juif assez récent, lancé par Philip Berg, qui présente
plusieurs caractéristiques propres aux sectes (rituels, système de croyance
structuré, importance omniprésente de l’argent, charisme et autorité
incontestés du chef spirituel). Toutefois, il semble que cela reste un cas
isolé. C’est plutôt la tension entre orthodoxie et hétérodoxie qui
domine, ainsi que le problème des relations juifs/non juifs, et les questions
posées par les différents courants contemporains de libéralisation du judaïsme.
Il existe trois formes de
dissidences religieuses en Islam. Celles nées des confrontations
doctrinales au sein même de la communauté islamique ; celles provoquées
par des mesures d’exclusion ; les contre-courants religieux issus de
groupes ayant l’islam comme point de départ, mais profondément métamorphosés
au contact de courants de pensée rattachés à d’autres traditions
religieuses. Le mouvement ahmadiyya, issu des milieux indiens de rite sunnite,
fait partie de ce troisième groupe. Il doit son origine à Mîrzâ Ghulâm
Ahmad. Son organisation est puissante et centralisée. Le mouvement se caractérise
en outre par une large disponibilité des cadres religieux à l’égard des
personnes accueillies, l’importance et la variété des moyens d’édition
et de diffusion de sa pensée et, surtout, le respect envers les personnes qui
ne partagent pas les convictions de l’ahmadisme.
Les « sectes »
hindoues ou bouddhistes qui se fondent sur une tradition religieuse
authentique, ne correspondent certainement pas à l’idée que le grand
public occidental se fait aujourd’hui des sectes, que l’on imagine comme
des groupes se livrant à des pratiques répréhensibles. Les véritables
doctrines des religions orientales sont très éloignées de l’orientalisme
de pacotille dans lequel se fourvoient les adeptes occidentaux des sectes
« orientalistes ».
Les tribunaux ecclésiastiques ont prononcé la nullité du mariage Pellegrini. Par le processus de l’exequatur (en italien delibazione), ce jugement a été reçu par la justice italienne et a eu des effets civils. Mme Pellegrini, partie défenderesse, s’est opposée en vain d’abord à la nullité canonique, puis à l’exequatur. Elle s’est tournée alors vers la Cour européenne des droits de l’homme, en arguant que ses droits de défense n’avaient pas été respectés par la procédure canonique (art. 6 de la Convention européenne) et que l’Italie aurait donc dû refuser l’exequatur. La Cour lui a donné raison. L’article analyse le système italien d’exequatur des arrêts des tribunaux matrimoniaux de l’Église, qui a connu de nombreuses évolutions depuis 1929, présente les arguments de la Cour européenne, et examine les conséquences qu’aura sans doute l’arrêt sur les équilibres entre droit italien et droit canonique.
L’utilisation d’une méthode « systématique », abstraite, aboutit à des impasses en théologie et en droit canonique. Par exemple, parler « du prêtre » (au singulier) devrait être réservé au Christ et ne pas être utilisé pour les ministres ordonnés. De même, presbyterorum ordo ne signifie pas « ordre des prêtres » ou « groupe des prêtres », mais « dignité presbytérale ». Une plus grande attention à la pastorale concrète devrait permettre d’éviter de tomber dans les pièges de l’abstraction.
Le
Professeur Carlos Larrainzar soutient que le manuscrit de Florence (Fd) ne serait pas simplement
un des exemplaires existants de la première recension ; il serait le
manuscrit original de la seconde recension du Décret, manuscrit sur lequel
Gratien aurait personnellement travaillé. De telles allégations seraient révolutionnaires
pour l’étude du Décret de Gratien, mais il faudrait prouver qu’elles sont
fondées. Or, une étude attentive et approfondie de ces affirmations montrent
qu’elles reposent sur des postulats implicites, infondés et bien
improbables.
L’étude de la Cause 13 dans les manuscrits de St-Gall (Sg) et de Florence (Fd)
confirme que Sg et Fd présentent un texte plus ancien que celui de Friedberg (Fr).
Les canons de la version courte dérivent de la Collection
d’Anselme de Lucques, de la Tripartite
et de la Collection en trois livres
(3L). Le Polycarpus ne semble pas avoir été utilisé. La version longue
a puisé dans les mêmes sources (principalement 3L), plus la Panormie,
mais n’ajoute rien de substantiel.
Cependant, la structure d’ensemble de Sg et de Fd diffère sensiblement. Sg
n’a pas de Prima pars et ne compte que 33 Causes, contre 36 dans Fd.
Mais la Causa prima de Sg contient des canons qu’on retrouve dans la Prima
pars de Fd. Sg pourrait donc avoir été un premier brouillon, avec des éléments
qui ont ultérieurement formé les distinctions de la Prima pars du Décret.
Ainsi, il apparaît que la version courte est elle-même le produit d’un développement
antérieur. C’est au moins un point sur lequel A. Winroth et C. Larrainzar
peuvent être d’accord.
Depuis les années 1950, il ne fait plus de doute que les textes justiniens sont
le fruit d’un processus complexe de révision et d’augmentation du Décret.
Mais, à ce jour, les interrogations restent ouvertes quant à la question de
savoir à quelle date débuta ce processus, quelle
fut sa cause et quels en furent le ou les
protagonistes principaux. Il apparaît que l’incorporation des textes justiniens se produisit graduellement, par étapes, et qu’elle fut la conséquence
d’un usage enseignant de l’œuvre de Gratien. Ce processus commença à des
dates précoces, en étroite relation avec l’École naissante des
civilistes.
La Bibliothèque municipale de Rouen conserve deux manuscrits du Décret de Gratien, dont le manuscrit E.21, qui vient de l’abbaye de Jumièges. L’originalité du manuscrit E.21 réside dans le fait que le scribe ne s’est pas contenté de recopier le texte qu’il avait sous les yeux, mais l’a modifié substantiellement. Il a également ajouté 167 textes nouveaux, tirés principalement du Liber ex Lege Moysi. Le manuscrit est plus ancien que ce que l’on dit généralement (2e moitié du xiie siècle), et il copie un manuscrit plus ancien encore.
Les Sirmondiennes sont une collection de seize ou dix-huit constitutions impériales
consacrées au droit cultuel, généralement publiées comme annexe au livre XVI
du Code théodosien. La plupart des romanistes admettent leur authenticité.
Pourtant, il semble qu’elles aient été composées au milieu du viiie
siècle, par le scriptorium de la cathédrale de Lyon. Elles seraient donc
contemporaines de la Fausse donation de Constantin. Mais leur esprit est
différent : les faussaires lyonnais sont « épiscopaliens » ou
« gallicans » et non « papistes » ou « romains ».
Le Code de droit canonique de 1917 est une réponse aux requêtes formulées par
les canonistes et les Pères du concile Vatican I, afin de rendre le droit
canonique plus accessible et supprimer les normes obsolètes. A côté de ces nécessités
d’ordre technique, les historiens du droit canonique avancent des motivations
d’ordre idéologique. La codification résulterait d’une volonté affichée
par l’Église, société parfaite, d’affirmer son pouvoir de juridiction
face aux États modernes.
Une relecture du motu proprio Arduum sane
munus (1904) de Pie X annonçant les travaux de codification met en lumière
un second argument : le Code devrait contribuer à restaurer un ordre
social chrétien, finalité de la politique intransigeante de Pie X et de ses prédécesseurs.
Cette restauration devait passer par la formation d’un clergé d’élite, par
l’antimodernisme et la formation des fidèles. Le législateur se fit-il l’écho
de cette politique ? Le Code de 1917 contient-il de l’intransigeance ?
La réponse est nuancée.
Le processus de codification du droit des Églises orientales ayant souvent été
traité de « latinisation »,
il est apparu nécessaire d’analyser si ces critiques s’avèrent fondées
et dans quelle mesure, en cas de réponse positive, elles le sont. Après un
bref aperçu de l’histoire de la codification orientale, plusieurs questions
sont résolues. En particulier, celle de savoir si le code est, en tant
qu’ouvrage juridique spécifique, contraire à la tradition orientale ;
si la structure du Code des canons des Églises orientales (CCEO) est une
expression de la latinisation ; si l’utilisation de la langue latine
est à considérer comme une latinisation.
Si l’on dresse le bilan des 18 ans d’application du Code de droit canonique
de 1983 et qu’on traite des perspectives de ce Code, on peut conclure que,
pour le moment, il n’est pas utile de constituer un nouveau Code, mais qu’il
est nécessaire d’élaborer une nouvelle herméneutique, pour l’appliquer et
l’interpréter. L’exemple de la prédication par les laïcs est particulièrement
révélateur.
L’objet de cette étude est de mesurer, d’une part, l’évolution du
facteur religieux sur le comportement électoral en Alsace, en mettant en évidence
la permanence de ce facteur, tout en constatant un rapprochement entre les
comportements électoraux des communes catholiques et des communes
protestantes.
D’autre part, il s’agit de se demander si le vote protestant pour le Front
national tel qu’il a pu être constaté en Alsace à partir des élections présidentielles
de 1988 constitue une spécificité alsacienne qu’il conviendrait de repérer
et d’interpréter, ou à l’inverse s’il n’est que la conséquence symétrique
de la relation entre intégration au catholicisme et vote pour la droite modérée
constatée pour la France dans son ensemble.
L’article présente
diverses interprétations du can. 915 ainsi que quelques propositions
nouvelles avancées récemment à leur sujet.